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Paris, le 7 septembre 2020 – E-CUBE Strategy Consultants et EWI publient une étude sur les risques de coupure d’électricité en Europe du Nord-Ouest à l’horizon 2030
Dans le cadre de la décarbonation de son économie, l’Europe s’est engagée dans une électrification massive des usages énergétiques (chauffage, transport). Combinée au remplacement rapide d’actifs de production thermique pilotables par de la production renouvelable intermittente, celle-ci pourrait affaiblir la capacité du système électrique européen à faire face à des vagues de froid extrêmes.
Les analyses de l’ENTSO-E[1] mettaient déjà en évidence il y a un an que la France et la Belgique auraient risqué des coupures d’électricité en cas de vague de froid l’hiver dernier.
L’étude réalisée conjointement par E-CUBE Strategy Consultants et par l'Institut d'économie de l'énergie de l'Université de Cologne (EWI) à la demande d’ENGIE évalue dans différents scénarios la capacité du système électrique nord-ouest européen (France, Allemagne, Belgique, Danemark, Luxembourg et Pays-Bas) à répondre à une vague de froid sévère à l’horizon 2030.
Elle montre qu’en 2030, en situation de vague de froid similaire à celles qu’a connues l’Europe en 1985, 1997 et 2012, un déficit de capacité de 35 à 70 GW pourrait conduire à des coupures d’électricité pendant 100 à 250 heures. Ces coupures affecteraient principalement les clients industriels mais aussi potentiellement les clients particuliers , avec un coût induit pour la collectivité estimé à 30 milliards d’euros.
Ces travaux mettent en évidence la contribution des pompes à chaleur (PAC) – principalement résidentielles et tertiaires – dans la formation du déséquilibre offre-demande ; leur coefficient de performance (COP) décroit fortement lorsque les températures deviennent négatives, amplifiant les appels de puissance pour les usages chauffage. Ils mettent également en exergue l’incertitude sur la performance des PAC en conditions réelles, en probable écart par rapport à la performance certifiée en laboratoire. La performance globale du parc de PAC dépendra également du type de technologies déployées (air-air, air-eau, eau-eau), toutes n’ayant pas les mêmes performances ni la même sensibilité à la température extérieure. Dernière incertitude : leur flexibilité, c’est-à-dire leur capacité à moduler leurs appels de puissance au cours de la journée en fonction des contraintes du système. Ces incertitudes sont critiques dans la définition du parc de production et de flexibilité (stockage, effacement) dont il faudra disposer pour satisfaire la demande à cet horizon.
Lors de vagues de froid intenses, dans les scénarios où se produisent déjà des coupures d’électricité, chaque PAC air-air supplémentaire augmenterait le coût des coupures de courant pour la société de l’ordre de 2 000 euros.
D’autres facteurs de criticité, susceptibles d’accentuer le déficit de production par rapport à la demande, sont analysés dans l’étude, en particulier en cas d’une moindre disponibilité du parc nucléaire français (telle qu’anticipée cet hiver) ou d’une faible hydraulicité (en lien avec des conditions météorologiques défavorables pour la production hydroélectrique)
Les risques pesant sur l’équilibre offre-demande peuvent conduire à une augmentation du coût de la décarbonation du système énergétique européen, voire à une fragilisation de l’adhésion publique à cet objectif, si le prix à payer est aussi de subir des coupures d’électricité.
Leur prise en compte dans les politiques publiques et le renforcement de la solidarité entre pays seront des enjeux majeurs de la réussite de la transition énergétique.
A horizon 2030, plusieurs solutions devront être étudiées : côté offre, le développement d’actifs de production pilotables, probablement des turbines à gaz et à biométhane ; côté demande, une gestion du mix du parc de chauffage avec une minimisation du nombre de résistances électriques et une incitation au déploiement de PAC hybrides, plus flexibles, au-delà d’un certain seuil de déploiement des PAC.
En effet, la trajectoire de décarbonation européenne devra arbitrer entre différents types de coûts : le coût de l’énergie non servie en cas de coupure, le coût de déploiement de PAC tout électriques, ou le coût de déploiement de PAC hybrides ou de turbines à gaz alimentées par du gaz décarboné ou faiblement carboné
Comme l’inertie du système électrique (le temps pour faire évoluer le parc de chauffage ou construire de nouveaux actifs de production) est très forte, la résilience du système en 2030 repose en grande partie sur des décisions prises aujourd’hui.
A propos d’E-CUBE Strategy Consultants
E-CUBE Strategy Consultants est un cabinet de conseil en stratégie spécialisé dans les secteurs de l’énergie, de l’environnement et des infrastructures énergie-mobilité.
E-CUBE a développé un corpus méthodologique spécifique destiné à accompagner les entreprises et les institutions publiques dans leurs démarches d’adaptation à une « nouvelle donne » énergétique, environnementale mais aussi digitale.
A travers ses trois bureaux à Paris, Bruxelles et Lausanne et son réseau international de partenaires, E-CUBE Strategy Consultants accompagne ses clients partout dans le monde.
[1] ENTSO-E - Winter Outlook 2019-2020
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